Congo-Brazaville

Patrick Briant, le chef de mission pour l’opération au Congo-Brazzaville, vous présente ce beau projet.

Qui êtes-vous ? Quelles ont été vos missions précédentes chez Electriciens sans frontières ?

J’ai rejoint Electriciens sans Frontières en 2006. Six mois plus tard, Jean-Louis Vierge m’a proposé de l’accompagner sur une première mission au fond du Congo Brazzaville, en pleine forêt tropicale, pour alimenter en énergie électrique un hôpital et une maternité. Cette première aventure riche de bellesrencontres avec les populations locales a été pour moi une révélation.

Depuis, avec mon comparse Jean-Louis, surnommé l’année dernière « Papa Noël » par un jeune Congolais, nous formons une équipe soudée et nous enchaînons les missions au nom d’Electriciens Sans Frontières pour aider les populations défavorisées en Afrique.

En 2010, nous sommes intervenus dans un orphelinat au Bénin abritant une trentaine d’enfants, en fiabilisant l’alimentation en énergie électrique des bâtiments et surtout en leur permettant d’accéder à l’eau courante.

Par la suite, notre route nous a ramené au Congo Brazzaville pour accompagner des médecins Bordelais de l’ASLAV* dans leurs projets. L’ASLAV soutient plusieurs centres de santé installés dans des zones défavorisées et très isolées, tenus par des congrégations religieuses qui viennent en aide aux plus démunis. Tout d’abord, nous avons alimenté en électricité le centre de santé de Voka en 2015, l’hôpital de Linzolo en 2017, ainsi que le centre de santé et la maternité de Moukondo situés à la périphérie de Brazzaville en bordure d’une décharge publique. Nous continuons cette belle aventure en 2019, avec ce nouveau projet.

Pourquoi avoir choisi de mener cette mission au Congo ? Quelles sont vos motivations ?

A l’occasion d’un de nos échanges réguliers, le Docteur Salefran nous a présenté la situation compliquée d’une sœur qui soignait les Pygmées, dans une cabane en bois complètement vermoulue au nord du Congo dans la commune d’Enyellé. Pour lui permettre de travailler dans de meilleures conditions, l’ASLAV avait décidé de remplacer cette cabane délabrée par un bâtiment en dur et le Docteur Salefran nous a proposé de venir installer l’électricité dans ce centre de santé tout neuf.

C’était une évidence pour nous de nous inscrire dans ce nouveau projet qui allait bénéficier aux populations considérées encore de nos jours comme des « esclaves », un temps que nous pensions révolu. Le courage et l’abnégation de cette religieuse, soignant les plus démunis avec très peu de ressources nous a ému et nous allions nous aussi lui apporter un peu de notre aide. A l’occasion de cette mission, nous avons décidé de traiter un second centre de santé situé dans la même région. L’ASLAV venait d’y adjoindre une maternité.

Quelles sont les conditions de santé à Epéna et Enyellé ?

L’accès aux soins demeure une difficulté majeure des populations congolaises. La situation sanitaire des populations autochtones est désastreuse et se dégrade à mesure qu’ils abandonnent la culture de la pharmacopée autrefois utilisée par leurs ancêtres. Le prix des médicaments et le coût exorbitant des évacuations sanitaires constituent un frein capital à l’accès aux soins de qualité pour la majorité des congolais et particulièrement pour les populations autochtones. Le pays souffre d’un manque criant en personnel médical et para médical. Les équipements et infrastructures sanitaires sont largement insuffisants et de nombreuses congrégations religieuses essaient avec leur peu de moyens de soigner du mieux possible les populations démunies.

Depuis quelques mois, les centres de santé d’Epéna et d’Enyellé profitent de la mise à disposition de médicaments fournis par l’ASLAV et les nouveaux bâtiments permettent aux sœurs de soigner les populations locales dans de meilleurs conditions. L’eau courante vient d’être installée dans les deux centres mais les soins et accouchements de nuit se déroulent toujours avec des lampes à pétrole.

Tous les cas médicaux un peu compliqués sont orientés vers les centres hospitaliers « les plus proches ». Pour Epéna il se situe à Impfondo (3 heures de route) et pour Enyellé il faut se rendre à Bétou (à deux heures de piste en saison sèche) ou à Impfondo (7h de piste ou 4h par voie fluviale).

Bien souvent les populations démunies autochtones ne peuvent pas se payer des consultations dans ces hôpitaux. Elles se retournent donc vers les centres de santé locaux des sœurs qui sont les seules à les soigner à moindre frais voire gratuitement.

Quel est l’objectif de votre mission là-bas ? Quel est son déroulement ?

L’objectif de cette mission est d’installer dans chaque centre de santé une unité de production photovoltaïque avec stockage d’énergie. Il s’agit également de réaliser l’éclairage des différentes pièces pour permettre aux sœurs de pratiquer des accouchements et des soins la nuit dans de meilleures conditions.

Après un parcours de 48 heures en 4X4, puis par bac et enfin en pirogue l’équipe constituée de deux membres d’Electriciens Sans Frontières, d’un représentant de l’ASLAV et du chauffeur se rendra sur le centre d’Enyellé pour réaliser l’ensemble des travaux. Ils seront accueillis par les congrégations religieuses qui les logeront et prépareront le petit déjeuner et le repas du soir. L’équipe vivra dans les mêmes  conditions que les sœurs, sans éclairage ni eau courante dans des logements souvent spartiates. Les journées de travail démarreront dès 6 heures du matin pour se terminer au coucher du soleil vers 18 heures. Le repas du midi est souvent constitué de fruits et beignets achetés au marché local.

La deuxième semaine l’équipe prendra la direction du centre d’Epéna situé un peu plus au sud pour réaliser l’alimentation électrique des deux bâtiments dans des conditions similaires. Le retour sera l’occasion pour l’équipe d’aller visiter les centres précédemment électrifiés et de revoir le personnel soignant. Voilà encore de bons moments à venir très émouvants pour tout le monde.

Quel sera l’impact de la mission sur les conditions de santé là-bas ?

Cette mission va permettre d’améliorer les conditions de soins des populations environnantes des deux centres de santé et particulièrement de permettre aux populations autochtones d’avoir un accès aux soins souvent refusé et améliorer ainsi leur santé. Cette mission va permettre aux sœurs d’apporter des soins aux patients dans de meilleures conditions de travail et de pouvoir réaliser des soins et accouchements la nuit. Les accouchements se dérouleront dans de meilleures conditions ce qui devrait à terme réduire la mortalité infantile.

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Lire le carnet de voyage au Congo-Brazzaville - Février 2019